216 Une panne classique en électricité…
216 Une panne classique en électricité...
Parmi les pannes possibles à bord, dans le domaine de l'électricité, il y en a une en particulier à laquelle peu de gens ne pensent et pourtant... Elle est source de plus des ¾ des ennuis dans ce domaine. Je veux parler du "point chaud".
Qu'est-ce donc que ce "point chaud" ?
Eh bien il s'agit tout simplement d'un endroit sur l'ensemble d'une ligne de distribution électrique, où il va se produire un "étranglement". Etranglement consécutif à un branchement défectueux, une liaison mal adaptée, un fil à moitié coupé, une prise sous dimensionnée, etc... Ce "frein" autrement dit, au passage normal du courant va provoquer une élévation de température sur cet endroit précis et là, vont commencer de sérieux ennuis. En effet, qui dit point chaud dit température qui s'élève et qui dit forte chaleur dit fusion, voire ignition du matériau avec démarrage possible d'un incendie ! Les statistiques le prouvent malheureusement. Les incendies ménagers, comme industriels, sont très souvent dus au départ à un court-circuit, un "point chaud électrique" qui dégénère. De plus en plus souvent, cela provient de l'emploi de matériels ou multiprises de piètre qualité et surchargées (chinoiseries à 2 $).
Alors dans quelles conditions apparaissent ces « points chauds » ?
Eh bien en matière de ligne électrique et de consommation (tension x courant = puissance), c'est très simple à comprendre. L'électricité sur une ligne se comporte exactement comme de l'eau dans un tuyau. Il faut donc que tous les "ingrédients" sur la ligne (fils, câbles, prises, cosses, dominos, raccords, bus de répartition...) depuis l'arrivée de la source électrique jusqu'à l'appareil consommateur soient adaptés à la puissance demandée. C'est aussi simple que çà. C'est toujours au maillon le plus faible de la chaîne (section la plus petite) que se produira le « point chaud ».
Dans ce domaine de la puissance...
Plus la puissance consommée sera grande et plus la section de la ligne (et de toutes ses liaisons intermédiaires - prises, raccords, dérivation) devra être conséquente elle aussi. Observez un grand arbre (tronc, grosses branches puis moyennes, puis petites et enfin branchettes...), eh bien les lignes électriques doivent être construites à l'identique !
De plus, plus la tension d'alimentation sera faible et plus la section des câbles de liaison devra être grosse. Ceci peut paraître paradoxal mais il en va ainsi en basse tension (BT). C'est le cas dans le domaine des véhicules routiers ou de nos bateaux ou la tension classique est de 12 Vcc.
Pour exemple...
Pour alimenter un guindeau tout à l'avant du bateau, il faudra au moins du 75 mm² de section si vous n'avez pas de batterie spéciale près de la baille (si longueur de 10m de câble ou plus parfois). Ce qui est énorme mais sera nécessaire.
Quels sont donc les points chauds classiques ?
Eh bien en BT, le point chaud le plus fréquent est une liaison de 2 conducteurs via un domino (un sucre comme on dit banalement). Sur les bateaux*, j'ai vu très souvent des liaisons de ce genre faites avec des fils nus, à moitié coupés lors du dénudage et non étamés. Ce qui fait que le fil s'écrase sous la pression de la vis de maintient en même temps que celle-ci coupe une autre partie du toron de fils déjà affaibli. Là, sans s'en apercevoir, on créé une bombe à retardement sur cet endroit du montage. Avec le temps qui passe, l'humidité, les vibrations ou autres tensions mécaniques, eh bien il ne va rester qu'une petite partie du contact (qui était prévu "bon", au départ). Dès qu'il y aura une surcharge, il y aura apparition d'un point chaud. Ceci apparaîtra d'autant plus vite que la puissance demandée sur la ligne sera importante et continue.
Conclusion : en BT, et cela sera d'autant plus vrai en milieu marin, toutes les liaisons filaires devront être étamées obligatoirement à l'étain avant fixation (que ce soit sur un domino, une cosse ou un bus de répartition). Ce geste est une sécurité absolue à bord d'un bateau, il permet de conserver la section originale du fil, améliore le contact et le protège de la corrosion. Donc triple protection.
Ensuite il y a la section des conducteurs en fonction de la puissance demandée.
Sachant que dès le départ, le 12 Vcc (la BT) demande une section de fil importante (pour ne pas perdre sur la tension en bout de ligne), eh bien il ne faudra pas lésiner sur le diamètre des fils conducteurs à mettre en place. Ensuite non seulement on doit penser à cet échantillonnage* pour les fils mais aussi pour tout ce qui sera raccordement sur cette ligne. Ce sera le cas pour les cosses, les prises, les bus de liaisons ou de distribution, etc...
Je ne vais pas en parler spécialement ici. Sur le Net, il existe des tas d'abaques qui donnent ces informations (f de puissance/ tension /longueur). Mais il est impératif de se rappeler cette règle et de l'appliquer..
NB : Petit aparté technique...
Aujourd'hui, on est bien plus exposé qu'autrefois à ces ennuis de point chaud.
Tout simplement, les matériaux utilisés dans la fabrication du matériel électrique a évolué, mais dans le mauvais sens. C'est « l'obsolescence programmée », encore elle et toujours, qui passe par là.
* échantillonnage : on peut prendre comme ratio de section de fils, la moitié de l'ampérage à y faire passer en mm² de section de fil. Exemple, si vous avez un appareil qui consomme 20A (soit en 12Vcc voisin de 250W), eh bien on peut mettre du 10 mm² de section surtout si la longueur commence à être importante. Ce truc est une astuce grossière mais bien utile dans la pratique.
Photo ci-dessous...
Exemple de point chaud arrivant sur une Triplite. Elle est soi-disant normalisée pour tenir 16A (cad pouvant distribuer une puissance de 3500W) mais la réalité est loin de çà. Le plastique se met à chauffer et il se forme une ligne de conduction à partir des éléments charbonnés. Et là, un court-circuit va se faire et initier un arc, voire un feu ...et le différentiel saute ! Une prise sale et/ou humide facilitera encore cet effet de court-circuit.
Phénomène bien visible sur cet exemple.
En fait que se passe-t-il dans un court-circuit ?
Eh bien, la pièce en question (prise, domino, raccord...) chauffe, se dilate et les contacts se font moins bons, ce qui augmente encore l'échauffement. Autrement dit, le système se mord la queue ! Il y a alors apparition de petits arcs électriques (étincelles parfois minuscules et invisibles mais qui donnent un grésillement audible). Ces petits arcs* occasionnels, ou permanents, vont brûler le matériau voisin qui lui, va devenir conducteur. Le plastique va donc charbonner petit à petit et bien sûr, le charbon étant bon conducteur, il y aura donc court-jus ! Si une protection se trouve sur le circuit, vous aurez la surprise de voir sauter votre différentiel (ou breaker) et ce phénomène va s'intensifier de plus en plus fréquemment avec le temps. Là, plus de doute, un point chaud est en train de s'établir en quelque part sur l'un des circuits.
Pour trouver l'appareil ou la ligne fautive, il faudra tout couper et remettre les lignes (ou appareils) en marche les uns après les autres jusqu'à déceler le fautif. On peut aussi « toucher » avec la main tous les points suspicieux d'être chauds. Sur un bateau, ce n'est pas toujours évident, vu le circuit emprunté par les faisceaux de câbles électriques. Se rappeler aussi que l'on peut avantageusement utiliser un long tuyau fin pour « écouter » dans des endroits inaccessibles (voir article ici).
* Arcs électriques : un moyen de savoir également si un arc se forme dans un endroit inaccessible, c'est de rechercher une odeur très particulière : celle de l'Ozone. En effet, ce gaz est généré en particulier (par ionisation spontanée) autour des arcs électriques. Si un néon ou un moteur électrique défectueux viennent à créer des arcs, vous sentirez cette odeur bien particulière à proximité. Ceci est un très bon moyen de déceler l'endroit d'un court-circuit en train de se faire.
Mais maintenant, les matériaux d'aujourd'hui...
Si auparavant, on utilisait volontiers la porcelaine, la céramique, le verre ou la Bakélite, de nos jours la grande majorité du matériel est fabriqué en plastique tendre. Ce matériau est le pire qui soit pour engendrer des points chauds en matière de circuits électriques. Il suffit de regarder tout le matériel en rayonnage dans nos magasins. Tout est fait en plastoc désormais et de mauvaise qualité en plus, le comble. Ces matériels sont à proscrire pour une installation sérieuse et durable. Il nous faut privilégier absolument, le caoutchouc dur, l'Ertalon ou le Teflon, la résine ou les plastiques armés. Les prix s'en ressentent c'est certain, mais la sécurité et la sérénité d'une bonne installation passera par là. Et en matière de contact ou de montage de cosses : toujours étamer les liaisons et respecter les bonnes sections de câbles à mettre en place. En 12 Vcc, il faudra toujours employer au minimum du 2,5 mm², c'est une bonne sécurité.
* bateaux : en matière de BT (véhicules, bateaux..), on utilisent toujours du fil souple multibrins. Ceci pour une simple raison, c'est qu'il est nécessaire de faufiler les faisceaux de câbles et fils électriques par des circuits tarabiscotés. Cela demande donc de la souplesse pour pouvoir être tirés et positionnés aisément.
Qu'on se le dise ...et bon vent !
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