015 Flammes, béquille ou fourche & bloque-gouvernes…
015 Flammes, béquille ou fourche & bloque-gouvernes…
A l'instar des pennons sur les voiliers, ces différents accessoires sont bien connus par les pilotes. Ils leurs apparaissent parfois comme étant quelque peu «folkloriques» sur les aéronefs (toutes catégories)... Eh bien détrompez-vous, ces accessoires sont bien utiles et beaucoup plus qu'on ne pourrait le penser comme cela, à première vue !
Voici pourquoi ils ont tant d'importance...
Ce propos est appuyé par des exemples concrets, cités en cas d'école, sur les conséquences de telles bevues.
Les flammes...
Ces rubans flashies et colorés sont grimés ainsi pour qu'ils se remarquent, çà c'est vraiment le premier point.
Ensuite s'ils existent c'est que des incidents (voire des accidents...) ont déterminé que leur emploi permet d'éviter bien des soucis et limitera la survenue d'ennuis (de pannes!).
Alors ces flammes sont positionnées principalement sur les trous des sondes statiques, les évents de réservoirs à carburant et la (les) sonde dynamique du Pitot. Mais il peut y en avoir d'autres, suivant le type d'avions... Ces flammes sont constituées d'un petit jonc rigide le plus souvent en plastique dur ou en inox ( faisant ressort et ajusté au diamètre du tuyau ou du nable à boucher!). Accroché dessus à un bout, on met un ruban coloré vif et suffisamment long pour être bien aperçu lors de la pré-vol justement (autour de 50cm en général).
Pour le circuit de mesure de vitesse (sonde Pitot et prises statiques latérales), eh bien si l'un de ces tubes se retrouve bouché ( insecte, particule quelconque...), c'est seulement au moment du décollage que vous vous apercevrez que vous n'avez plus de Badin ni d'alti. Et là, de suite, ce sera la panique pour un pilote lambda ! A moins de connaître parfaitement l'appareil et d'avoir une grande expérience de l'aviation, toute manoeuvre vous paraîtra de suite, insensée ! Car nous faisons tout à partir de notre Badin, notre vitesse et de notre altimètre. Il faudra donc se reposer d'urgence et là, c'est pas gagné car atterrir sans alti et sans Badin relève déjà d'un défi. Ensuite, il faudra vérifier et nettoyer tout le circuit d'air du Pitot (statiques et dynamique).
Exemple d'accident survenu pour un oubli d'avoir enlevé les obturateurs...
Lors du dégivrage d'un appareil au sol, les personnels en fonction mettent des collants (avec flammes) sur les statiques et les diverses ouvertures pour ne pas boucher justement ces orifices accidentellement ou même faire entrer simplement de ces produits dégivrants (Glycol) dans les circuits concernés. Bien. Sur un vol commercial en partance de Lima à destination de Santiago (Vol AEP 603 en octobre 1996) eh bien les agents de pistes en service au portique de dégivrage ont bien mis des collants sur les statiques mais les flammes obligatoirement associées à cette action, étaient absentes. Les obturateurs étaient donc « devenues non visualisables ». Au moment de libérer l'appareil de ses entraves de dégivrage (portiques roulants et rampes...), ces collants ont été oubliés car invisibles dans le feu de l'action et l'avion est parti ainsi : statiques bouchées. C'est juste après le décollage que les pilotes se sont aperçu qu'un problème grave survenait. Le calculateur devenait fou en affichant des indications de vitesse et d'altitude complètement erronées, parfois contradictoires ! Là, les pilotes n'ont pas pu comprendre ce qui arrivait. Ce vol étant effectué par une nuit noire, s'est malheureusement terminé par un crash en mer cinq minutes après avoir décollé avec la perte totale de l'appareil et de ses occupants (70 morts !).
Conclusion : oublier ces flammes en place ou bien utiliser des «obturateurs partiellement abîmés» peut être lourd de conséquences ! Cet exemple est un cas d'école désormais.
Béquille ou fourche...
Cette fourche (appelée aussi béquille suivant sa forme...) sert à manoeuvrer l'appareil lorsqu'il s'agit de le déplacer au sol dans un espace réduit. Elle s'applique sur le train avant où un axe est spécialement prévu pour son emprise et son maintient par effet ressort (avec parfois un verrouillage). Il suffit ensuite de tirer ou repousser l'appareil par ce train avant qui est directif pour positionner l'avion au bon endroit. (Ce système est identique sur les gros appareils sauf que ce n'est pas vous qui poussez à la main mais un puissant tracteur).
Pour un vol avec posé extérieur il est indispensable d'emporter cette fourche ou béquille. Car si vous avez besoin de manoeuvrer votre appareil au sol, eh bien, vous aurez le nécessaire avec vous pour ce faire.
Par contre, il ne faudra pas l'oublier non plus en place sur le train avant ! Il m'est arrivé de voir un avion s'aligner en piste pour le décollage avec sa fourche encore en place. Si vous débutez le roulage ainsi, la fourche, au premier accro sur le sol, va rebondir dans l'hélice et là, c'est l'accident assuré*... !
Il est donc très important de la retirer «de suite du train avant», lorsqu'on se sert de cette fourche pour manoeuvrer un appareil.
*accident classique pouvant être engendré : Lorsque qu'un objet, (quel qu'il soit) touche une pale sur un avion léger en vol, l'hélice se retrouver faussée pour le moins ou pire, on perd un morceau sur une pale... Là, les conséquences directes de ce déséquilibre aussitôt engendré fait que des vibrations intenses surviennent au GMP et peuvent être suffisamment fortes pour arracher le moteur du son bâti cellule ! La suite sera forcément dramatique. Si le moteur est arraché, l'appareil sort immédiatement de son enveloppe de centrage, devient totalement incontrôlable, part en feuille morte et c'est donc l'accident fatal, assuré !
Ce genre d'accident m'est arrivé en Guyane en 1987 lorsque j'ai percuté en plein vol (vol de calibration pour un tir Ariane), un groupe d'oiseaux (urubus). Là, des vibrations intenses se sont produites aussitôt , j'ai donc coupé le GMP de suite et chercher un endroit dégagé pour me poser en catastrophe dans l'enceinte du Centre Spatial. Heureusement pour moi, en tant qu'instructeur, je connaissais parfaitement cette machine et la zone de survol du CSG également. Malgré la très basse altitude que j'avais au moment du choc, j'ai pu me poser sur un chemin, le long de la clôture électrifiée du CSG sans rien toucher ! Ouf... ! Partout alentours il n'y avait que des marécages avec ses habitants (entres autres, caïmans et serpents...). Se vacher dans ces marais aurait été beaucoup plus délicat pour l'avion, comme pour moi... C'est dire si un choc sur une hélice peut être grave de conséquences.
Bloque-gouvernes...
Ce petit appendice sert à bloquer le manche, donc par voie de conséquence directe, la gouverne de profondeur et les ailerons. Il est souvent constitué d'une grosse goupille nantie d'une plaque de couleur flashie, encore et toujours, afin de bien la repérer. Il peut être parfois conçu et adapté différemment suivant le type de manche à balais installé au poste de pilotage (en pied ou de console). Ce bloque-gouverne et très important car dans nos avions légers, les commandes de vols se faisant par câbles, il ne faut surtout pas que durant les heures de repos de l'appareil au sol, ces gouvernes puissent battre librement ou vibrer (mues de façon brutale par le vent ou même le souffle d'autres appareils en mouvement alentours!). Sinon il pourrait se produire une usure prématurée de ces câbles sur les points de portage (réas, passe-fils de cloisons, renvois d'angles...) et ceux-ci ne sont pas « visibles » donc « non vérifiables » par le pilote lors d'une visite pré-vol. Etant inspectés seulement lors des grandes visites, ils pourraient donc s'abîmer bien plus rapidement que prévu au manuel d'entretien si le bloque-gouverne n'est pas utilisé à bon escient, quotidiennement.
Un accident de ce type est survenu en août 2007 à Mooréa (Tahiti) sur un Twin-Otter DHC-6 à cause justement de cette usure prématurée des câbles de commandes de la profondeur. Les avions de la compagnie locale, étaient stationnés au sol juste en bout de piste 04, à Faaa, dans le souffle direct des réacteurs des avions gros porteurs, faisant leur demi-tour pour alignement. Vraiment pas de chance pour cet exemple précis car la raquette d'évolution au seuil de piste était située du côté du parking d'Air Mooréa (Nord) alors qu'elle aurait pu être implantée de l'autre côté, donc côté Sud ! En outre, cette raquette Nord aurait du être équipée de barrières anti jet-blast (protection de souffle), mais elles étaient absentes.
Cela s'est soldée par la perte totale de l'appareil peu après le décollage de Mooréa (et malheureusement 20 morts) ! C'est encore un cas d'école pour ce genre de «causes sournoises et de ses effets dévastateurs» !
Conclusion...
Pour ces trois accessoires, flammes, fourche (ou béquille) et bloque-gouvernes, leur emploi et leur place à bord sont loin d'être du folklore, ils sont bien plus que «seulement utiles», ils sont réellement de vrais outils, indispensables pour un aéronef et ceci quel qu'il soit !
Qu’on se le dise …et bon vol !
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