003 Echouage & Déséchouage...
Trucs & Astuces, précédente...
03 SE SORTIR SEUL, D'UN ECHOUAGE…
Une mise au sec, partielle ou complète, mais toujours "accidentelle" du bateau est toujours possible dès lors que l'on fréquente des lieux difficiles…
Cette fortune de mer arrive tôt ou tard, même en étant prudent et forcement tout navigateur averti y pense un jour ou l'autre… Jusqu'à ce jour maudit (ou nuit aussi, c'est encore pire) quand l'échouage vous arrive pour de "bon" !
Que faire, comment s'y prendre pour sortir son bateau de ce mauvais pas ?
Alors de suite, bien sûr, autant de lieux, autant de bateaux, autant de circonstances différentes pour rendre un déséchouage possible ou impossible. Mais ici, à travers cet article particulier, je voudrai présenter le côté pratique d'aborder une tentative de déséchouage par ses propres moyens, bien évidemment, comme toutes les astuces présentées dans ce chapitre Trucs & Astuces… Quand on est dans un endroit civilisé, on peut trouver de l'aide, appeler à la radio VHF, utiliser son téléphone portable pour ameuter les copains qui arriveront à votre secours avec du matériel… Mais quand vous êtes dans un coin isolé, et vraiment seul où vous ne pouvez que compter sur vous-même et vos propres "connaissances"… Eh bien là encore ce sont les mathématiques et la connaissance d'astuces, comme celle-ci, qui vont vous être utiles…
Deux grands cas se présentent à nous.
1) Vous vous échouez en zone de marée…
Là, le tout premier danger qui vous guette c'est la perte du bateau par le remplissage de celui-ci lors de la remontée des eaux si le voilier s'est couché complètement "à plat"… En effet, il existe de nombreux orifices dans une coque de bateau et sur le pont… Events de réservoir (eau - gasoil) mais aussi oreillettes de ventilation de cale, aspiration moteur, dorades, crosse de passage de fils et de commandes… Et avant que l'effet Archimède ait eu le temps de commencer à soulager la coque, toutes nos fameux orifices seront recouverts et se feront un plaisir de tout remplir si on ne fait rien… En premier, donc dans ce cas précis, il faut tout obturer et tout est bon pour le faire… (chiffons, scotch, joint silicone, sac plastique, morceaux de chambres à air de voiture, etc…). En second lieu, il faut porter une ou mieux des ancres très loin du bateau et tendre une solide ligne de mouillage (mixte pour la souplesse) pour se tirer dessus dès que la hauteur d'eau le permettra. Penser toutefois que le temps d'une renverse de marée dure longtemps et que par conséquent, la sortie du piège va peut-être s'effectuer durant la nuit. Dans ce cas prévoir de mouiller une balise lumineuse, pour se repérer depuis le bateau… Si tout se passe bien, la marée montante permettra de se sortir de ce mauvais pas sans trop de "bobos"... Dans ce cas, c'est surtout la patience et le bon sens qui paie le mieux !
2) Vous vous échouez en zone sans marée…
Cette fois les choses se compliquent sérieusement et c'est surtout dans ce cas-là que les mathématiques vont nous aider… Car vous le savez bien, il est impossible de tirer sur une charge de dix tonnes posée sur le sol… Qu'il soit sableux ou caillouteux, c'est identique d'ailleurs ! Il n'y aurait peut-être que des fonds vaseux qui faciliteraient une glissade mais on ne choisit pas vraiment son coin pour se planter…
Le premier réflexe que l'on peut avoir c'est de procéder comme pour le premier cas. C'est en partie vrai mais les maths nous disent que non et c'est avec un petit schéma que je vais illustrer le propos…
Voir pour le petit schéma, ici...
En premier, il faut donc mettre en place une première ligne de mouillage très longue aussi mais cette fois utiliser une ligne la plus rigide, la plus tendue possible… c'est-à-dire n'utiliser que de la chaîne ou du câble d'acier si vous avez ça en réserve ! Du cordage éventuellement mais uniquement du type drisse (c'est-à-dire du pré-étiré, qui ne s'allonge pas).
En second, il faut préparer une seconde ligne dite de "traction" mais cette fois la plus souple possible et en y ajoutant un palan si vous disposez de ce matériel à bord (cela me paraît indispensable). Cette ligne de traction, il faudra l'accrocher en place au milieu de la ligne du mouillage principale pour qu'elle puisse tirer en plein travers de celle-ci (à 90°, voir schéma).
Plus la ligne de mouillage principale sera rigide et tendue, plus la ligne de mouillage secondaire sera souple avec une bonne démultiplication grâce au palan (voir Nota 1) et plus facile sera la sortie du bateau !
Petite explication sur les forces en jeux…( C'est une petite leçon de géométrie vectorielle en somme) :
Si vous prenez bien soin de rigidifier au maximum la ligne de mouillage principal (avec le guindeau du bateau par exemple), eh bien vous aurez d'autant plus de force pour tirer sur le travers la ligne de mouillage secondaire et déplacer vers l'avant le bateau... A chaque fois que vous gagnez du terrain, il faut détendre le palan, retendre le mouillage principal au maxi, retirer sur le palan... Et tout refaire à chaque fois ! La manipulation est longue et fastidieuse mais elle fonctionne bien ! la force obtenue est énorme... C'est la résultante tout bête d'un losange de force (comme dans le pantographe)… Pour augmenter la résistance de cette dernière, n'hésitez à saisir le câble ou la chaîne du mouillage secondaire sur une patate de corail ou un rocher pour assurer la prise du palan de façon parfaite. Ainsi vous gagnerez encore en efficacité sur la traction. On arrive ainsi à multiplier une force humaine par 10, 20, 30, voire plus, en fonction du palan utilisé et ainsi tirer seul, des charges extrêmement lourdes. Petit conseil utile, comme les forces que vous aller mettre en œuvre sont considérables avec ce système, penser à utiliser des cordages à la hauteur des efforts demander. Pour info, une corde en nylon (mouillée) de 20 m/m de diamètre résiste jusqu'à 8 tonnes environ et une chaîne de mouillage de 10 m/m de section jusqu'à plus de 5 tonnes. Mais en général pour pouvoir déplacer un bateau de 10 tonnes, en pratique, un effort de une tonne, une tonne et demie suffit car les frottements du portage sont relativement "faibles". C'est la raison pour laquelle ce système de traction en Té est d'une redoutable efficacité !
Si vous n'êtes pas convaincu...
Faites cet essai avec votre voiture si un jour vous allez au fossé… Vous verrez, tout seul vous arriverez à la sortir de ce mauvais pas. Mais pour cela, il faut que vous tirez sur le travers plutôt que de s'épuiser "bêtement" de face comme un bourricot le ferait en tenant la corde entre les dents…! Faire mettre une cale à chaque fois que vous gagnez un peu de terrain puis retendre parfaitement la ligne principale avant de tirer à nouveau sur le côté, puis caler, et refaire la manipulation à nouveau. La manœuvre est longue mais le résultat garanti, même tout seul ! Le plus long est de mettre en place le système… Mais si il y a des arbres autour de vous et, bien sûr que vous disposez d'un minimum de deux gros cordages… Eh bien le tour sera jouable. Et puis même si vous demandez de l'aide à un agriculteur du coin, de venir avec son tracteur, demandez-lui alors de prendre deux cordes pour faire ce système, la tâche en sera d'autant facilitée…!
Ce système, enfin ce "truc de matheux" est vraiment à connaître pour tout candidat à l'extrême ! Il peut permettre de sauver son bateau et même sa vie !
Nota 1 : Si vous ne disposez pas d'un palan, il est toutefois possible de s'en fabriquer un "speudo" : un "tenseur", en utilisant le bon vieux principe du tourniquet. Principe utilisé à bon escient par les menuisiers pour tendre une lame de scie dans sa monture... A savoir : un cordage passé en double que l'on tend par torsion à l'aide d'un bâton enfilé entre les deux brins de celui-ci ! Attention, car une fois votre système torsadé et tendu à mort, le bâton devient un projectile potentiellement dangereux si vous lâcher le "tenseur"...! Il faut donc prévoir une retenue. Prévoir également un second cordage que vous mettrez en place à côté de votre tenseur, en sécurité et qui permettra de détendre le tenseur pour le repositionner. Après cela, resserrer le cordage du tenseur au plus court et recommencer l'opération... Ce système nécessite de nombreuses manipulations mais il fonctionne très bien. Il permet d'obtenir une traction phénoménale, comme un palan !
Dernier truc, il m'est arrivé de torsader les brins d'un palan en tenseur pour augmenter encore la force finale du palan car ce système à le mérite de fonctionner sans à-coup (contrairement au palan). Parfois cette "finesse de mouvement" est bien utile pour positionner avec précision une très lourde charge.
Qu'on se le se dise ...et bon vent !
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