007 Un cyclone arrive sur vous ! Détermination de sa route...
07 Détermination de la route d'un cyclone…
Si vous fréquentez les zones de navigation à risques durant leur saison cyclonique, eh bien vous avez forcement pensé à cette éventualité de voir une de ces terribles tempêtes arriver sur vous…. Nous c'est notre cas, nous avons traversé l'atlantique en août 79 en subissant deux cyclones, coup sur coup : David et Frederic… Bien ! Dans cette éventualité, les conséquences du passage du phénomène ne vont pas du tout être les mêmes suivant que vous vous trouverez dans la partie dangereuse ou dans la partie maniable de la tempête.
Voir la distribution des vents en fonction de l'hémisphère avec leur secteurs respectifs près de l'équateur, le caractère gras indique la force du vent...:
Voir également comment évolue ce secteur dangereux lorsque ces dépressions continuent leur route dans la circulation des tempêtes d'Ouest en arrivant sur l'Europe...:
MAJ de mars 2010...: Avec le passage de Xynthia ces derniers jours, on comprend pourquoi c'est la côte Sud Bretagne et Vendée qui a été la plus durement touchée. Car elle était située en plein dans la zone "dangereuse" de la tempête. Sur la côte Nord Bretagne, les phénomènes violents étaient amoindris : zone maniable de cette dépression cyclonique. C'est une parfaite illustration (malheureuse, hélas) de l'importance de sa situation géographique par rapport au centre dépressionnaire et à la trajectoire de ces perturbations.
Idem pour la tempête Klaus passée en janvier 2009. Le coeur de la dépression était passée sur les Charentes et c'est donc toute la partie Sud, les Landes, qui ont été "rasé" (violence du secteur dangereux) !
Prenons un exemple concret :
Petit rappel d'importance auparavant :
Dans une dépression les vents sont convergents depuis l'extérieur vers le centre et "montent" dans l'œil de celle-ci. C'est près du centre qu'ils sont les plus forts.
Dans un anticyclone, les vents sont divergents depuis le centre vers l'extérieur. Les vents "tombent" d'altitude par une sorte d'entonnoir et se diffusent à partir du centre sur le sol en "rayons de bicyclette"… Pratiquement nuls au centre, les vents anticycloniques peuvent être très forts dans la partie médiane de l'anticyclone surtout si la couche nuageuse de l'étage moyen alentours (2 – 6 km) est épaisse et dense ; idem si ces vents rencontrent un continent avec des reliefs.
Dans un cyclone de niveau 1 sur l'Echelle Saffir-Simpson les vents sont (au minimum pour être classé…1) de 63 nœuds. Si le cyclone lui-même se déplace à 20 nœuds (voir nota 4 ; le vent interne et la vitesse de déplacement s'additionnent de façon vectorielle) eh bien nous allons trouver (grosso modo) des vents résultants côté maniable à : 63 - 20 = 43 Nds et dans sa partie dangereuse : 63 + 20 = 83 Nds. Vous voyez de suite que la vitesse (et donc la force ) des vents est complètement différente, (en pratique le double pour arrondir ! ) suivant que vous allez vous trouver d'un côté ou de l'autre du cyclone ! D'où l'importance de savoir de quel côté fuir pour ne pas aller se fourrer dans sa partie dangereuse, évidement (voir nota1 en bas).
A part la solution qui consiste à recevoir une carte et donc connaître sa position, que nous reste-t-il donc comme méthode empirique pour connaître sa position ? Hé bien, regarder ! C'est l'objet de ce truc, faire des observations successives et noter sur un papier les éléments… Suivant le sens de rotation des vents (bien visible sur les photos satellites, et la courbe du barographe (le suivi noté des pressions si vous n'avez qu'un baromètre…), ci-dessous :
Vous allez pouvoir définir sa route ainsi…
Etudions le cas d'un observateur qui est mouillé à l'île de la Dominique et qui observe le vent en regardant vers l'Afrique, vers l'Est. Déjà, dans les 2 jours qui précèdent l'arrivée d'un cyclone, il y a peu ou pas de vent, la perturbation coupe complètement les alizés ! Ensuite…
- Le vent est stable en direction et forcit : le cyclone vient sur vous. (Le baro descend )
- Le vent vient toujours de la même direction et forcit encore : idem cela doit vous alerter car il vient droit sur vous (le baro descend toujours) !
Maintenant deux cas se présentent à vous :
1- Le vent a tendance à tourner par votre Sud, (Sud-Ouest, Sud ou Sud-Est et ne forcit plus ou peu et la descente du baro ralentit)… Le cyclone va passer dans votre Nord (sur la Guadeloupe ) et vous serez dans le secteur maniable de la dépression, la partie droite pour un observateur y faisant face. (En général le baro descend encore un peu car le puits de pression dans un cyclone fait un V très marqué au plus près du passage de celui-ci puis remonte aussi brutalement). Dans notre exemple le vent va avoisiner 45 Nds avec des rafales atteignant 60-65 Nds sous les grains les plus forts (Voir Nota2 en bas)…
2- Le vent a tendance à tourner par le Nord (Nord-Ouest, Nord, Nord-Est et forcit nettement en général) vous allez passer dans la partie dangereuse de la dépression, la partie gauche du phénomène… Le cyclone va passer dans votre Sud (sur la Martinique)… Il faut vous préparer au pire… Dans ce cas le vent va atteindre 80-85 Nds avec des rafales pouvant dépasser les 125 Nds. On voit de suite les conséquences dramatiques d'une telle violence. S'il est possible de résister sur son mouillage jusqu'à 55 - 60 Nds (un peu plus dans le meilleur des cas) au delà de 80, 85 Nds ce sera mission impossible (voir nota 3 pour la poussée) ! Avec les conséquences que l'on connaît d'aller s'échouer sur la côte.
Ceci était un exemple d'étude pour l'hémisphère Nord. Dans l'hémisphère Sud, c'est le contraire qui s'établit puisque les anticyclones comme les dépressions tournent dans les sens inverse du nôtre.
Rappel : Anticyclones S et dépressions N (ou cyclones N) tournent vers la gauche sur elles-mêmes (dans le sens contra horaire ou encore sens trigonométrique).
Anticyclones N et dépressions S tournent vers la droite, dans le sens horaire.
Se rappeler simplement que le vent va tourner du côté opposé au passage de l'œil et que le côté maniable est celui tourné vers l'équateur pour un observateur situé en zone tropicale. La règle est la même dans les 2 hémisphères.
Lorsque les dépressions tropicales deviennent extra tropicales, le côté maniable ne va plus se trouver du côté de l'équateur mais du côté polaire car leur trajectoire n'est plus Ouest mais Est… Donc attention au piège pour une situation en zone tempérée, piège valable pour les deux hémisphères… Voir carte pour le cas d'une dépression arrivant sur la France.
Nota 1 : Durant la seconde guerre mondiale, l'amiral Ashley commandant une escadre de la flotte américaine du Pacifique, s'est "trompé" de côté à l'approche d'un typhon… C'était le 18 décembre 1944 lors d'une bataille célèbre près des Philippines… Une partie de son armada est allée, sous ses ordres, se fourrer dans la partie dangereuse du typhon au lieu de s'en échapper par le secteur maniable… Bilan, le tiers de sa Flotte perdue : 650 hommes, 3 navires et 150 avions disparus corps et âmes… De plus une dizaine de bateaux se sont retrouvés hors d'état de servir, conséquence de cette "erreur" de tactique. Un cas d'école dans les annales de la météo que je cite volontiers !
Nota 2 : Pour calculer la vitesse approximative du vent "maniable" dans une dépression il suffit de faire la soustraction suivante : 1030 – la pression maxi atteinte sur votre baro = vents moyens en nœuds que vous pouvez subir. Dans notre cas, le baro sera descendu aux environs de 985 mb. Exemple 1030 – 985 = 45 Nds. Pour connaître la force des rafales les plus fortes cette fois, il suffira de prendre cette valeur et de la multiplier par 1,5… Soit 45 X 1,5 = 67,5 Nds.
Dans le cas du secteur dangereux, là où les vents seront de 80-85 Nds, eh bien les rafales les plus fortes seront de l'ordre de 80 X 1,5 = 120 Nds ! Cela devient vite démentiel de puissance. D'où le nom de secteur dangereux !
Nota 3 : Une formule tirée de la mécanique des fluides qui permet de calculer de façon empirique toujours la poussée dû au vent en fonction de sa vitesse : F = kSV²
où F = la "force" de poussée, en kilo.
k= constante d'inertie, coefficient qui dépend de la nature et de la densité du fluide (gaz, liquide... - j'ai arrondi à 0,14 pour l'air).
S= la surface en m² que l'obstacle offre au vent.
V= vitesse du vent en m/seconde sachant que pour obtenir des m/s à partir des Nds, c'est facile, on prend la moitié… 10 Nds = 5m/s grosso modo !
Pour exemple, un vent de 50 Nds donne une poussée de 85 kg par m2.
" 100 Nds " 350 kg " .
" 150 Nds " 790 kg " .
La tonne de poussée / m² est atteinte avec 170 nœuds (315 km/h) de vent ! Rien ne résiste !
Nota 4 : Un cyclone dans sa phase de développement se déplace assez lentement de l'ordre de 5 à 15 Nds. Puis au fur et à mesure qu'il s'éloigne de l'équateur, il s'accélère pour prendre une vitesse moyenne de 15 à 25 Nds. Mais il arrive (tout en sachant qu'ils stoppent parfois) que leur vitesse atteigne 40 Nds... On imagine alors ce que cela engendre comme différence de vitesse (et donc de force induite) du vent entre les deux secteurs, maniable et dangereux …
PS : Toutes les formules de calcul et trucs donnés ici n'ont aucun caractère scientifique. Ils ont simplement le mérite d'être simples et pratiques. C'est le fruit de 25 années d'observation, de notes et d'étude attentive de la météo de ma part. Ceci, tant en navigation maritime qu'aérienne sur tous les continents…en étant également pilote-instructeur avion…! Je pense d'ailleurs faire prochainement un Blog dédié entièrement à la météo pour mettre sur le Net, nos observations pratiques et des cours de vulgarisation…!
Qu'on se le dise ...et bon vent !
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 234 autres membres