Le Trésor Des Kerguelen

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119 Cambuse pour une longue traversée...

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119 Cambuse pour une longue traversée…

 

 

     Quand on prépare une grande traversée, comme peut l'être celle d'un océan et de l'océan Pacifique en particulier (le plus grand), on est vite confronté à la question…

 

Que doit-on emporter comme nourriture pour cette longue période de traversée et d'isolement total ?

 

 

     Parmi tous les océans, le Pacifique est le plus grand de toute la Planète. Sa traversée va donc durée des semaines. Pour ma part, celle-ci a duré 42 jours (soit 6 semaines entières) depuis les côtes du Chili pour atteindre les Tuamotus en Polynésie Française et 5 jours de plus pour atteindre Tahiti. Ce qui représente une navigation ininterrompue, sans aucune Terre, de 6 semaines environs dans l'isolement le plus total. Si l'on considère qu'un accident exceptionnel comme un démâtage ou une avarie importante de safran peut ralentir notablement le bateau, on peut donc prévoir un isolement total possible pouvant atteindre deux, voire trois mois, sans aucun secours ni ravitaillement possible. Pour mémoire, le rail des Alizés de l'océan Pacifique (25° N à 25° S en pratique) est un désert d'un point de vue navigation. Aucune ligne de routes maritimes n'y passe !

 

Conclusion : 3 mois est le chiffre que nous avions retenu pour un avitaillement de sécurité (nourriture et eau de boisson) en autonomie totale pour l'équipage au complet, soit 4 personnes dans notre cas.

 

Voilà donc posé, le problème d'un avitaillement longue durée.

Reste à le résoudre !

 

Que faut-il donc emporter, avoir avec soi à bord, pour conserver le meilleur équilibre alimentaire possible dans les repas et la nourriture du bord pour tout ce temps ?

 

 

Le côté nourriture…

 

     Un premier point concernant une possibilité de source de nourriture durant une longue traversée est la pêche à la traîne. Alors avant de se lancer à l'assaut d'un grand océan, ne pas oublier de s'équiper de la panoplie du parfait pêcheur : moulinets, cannes éventuellement, bobines de fil de Nylon, hameçons et autres leurres de traîne en réserve.

N'oubliez jamais que, une fois au large, vous ne pourrez compter que sur vos équipements et réserves, et eux/ elles seules !

Voir ici sur cet article, "La panoplie de pêche de Kerguelen"...


Dans la réserve du bord, il faudra avoir une bonne quantité de riz, de pâtes, de farine. Ne pas omettre de prendre également de la levure pour pouvoir fabriquer du pain ou des gâteaux. Même en navigation, il est intéressant de pouvoir s'offrir de petits extras de pâtisserie à l'occasion d'une fête, d'un anniversaire ou d'un évènement particulier à la vie du bord (passage de l'équateur, de la ligne de changement de date)…/…

 

 

     Une source de nourriture peu connue mais très intéressante pour les longues périodes d'isolement sont les graines, algues et produits particuliers chers à la Macrobiotique. C'est une discipline de nourriture complexe développée à l'origine par des moines asiatiques (Japonais, Chinois, Coréens), elle est à la fois diététique et thérapeutique.

 


Parmi tous ces aliments Macrobiotique, on peut citer…

 

     Les Algues (un article leur est consacré...ici...), l'Azuki, le Boulghour, les Champignons séchés, le Gomasio (condiment à base de sel et de graines de sésame concassées), le Kale ou choux chinois (ou encore choux branches), le soja jaune, le pois d'Angoll, les Pickles de légumes (variés), le Potimaron (ou Couash), le Shoyu (ou Tamari - est une sauce aigre douce), le Tofu, le Wasabi (condiment piquant à base de radis noir Raifort)… Bien d'autres encore… Je vous conseille d'ailleurs de vous documenter sur ce sujet passionnant de la macrobiotique. Il est très intéressant de comprendre les problèmes d'équilibre de son corps (entre Yin & Yang) par la nourriture apportée...

 

Concernant les graines, il est intéressant de savoir faire un petit incubateur* également et mettre des graines à germer. Pour ce faire, beaucoup sont utilisables comme le blé, les lentilles, le soja, le millet, le sésame, etc… Cela permettra d'avoir une petite touche de verdure dans le quotidien, luxe suprême quand on vit au beau milieu de l'océan et que tout baigne dans l'eau et le sel !

 

En ce qui concerne les petits déjeuners, il est facile de disposer de différentes choses entre, café lyophilisé, chocolat en poudre, ou infusions (thé, tisanes), le choix ne manque pas. Mais se rappeler aussi que ces boissons consomment beaucoup d'eau. Pour le lait, il sera toujours plus facile d'emporter des boîtes de lait en poudre que du lait liquide (genre UHT) car les TetraBrick classiques sont lourds et fragiles, les bouteilles même en plastique, aussi. Donc eau de préparation à prévoir en quantité supplémentaire également.

 

* incubateur : une simple boîte en plastique transparent (genre boîte de gâteaux ou de croissants) suffit. Le couvercle doit posséder des petits trous d'aération. On met dans le fond un tapis de ouate ou une petite serviette éponge épaisse. Ensuite reste à déposer les graines dessus. Déposer l'incubateur dans un endroit lumineux, exposé au chaud. Les nôtres étaient calées sur les étagères au-dessus de la gasinière. On a utilisé aussi (en climat plus froid), le dessus de l'évaporateur du frigo, il dégage beaucoup de chaleur.  Enfin, on arrosait de temps à autre juste pour humidifier l'éponge avec un petit pulvérisateur à vitre, eau de pluie de préférence (sans hydroclonasone, ni eau de javel - purifiants de réservoir).


NB : voir ici un article spécial sur les graines à germer...

ou plus récemment ici, sur la fabrication d'un germoir...



Pour ce qui est des fruits "frais"…


     Parmi les fruits frais se conservant bien sur la durée, on trouve en toute première place les pamplemousses, les citrons et les limes. On peut compléter par d'autres fruits (tropicaux ou pas) fonction de la saison et/ou du pays de départ… Mais bien peu se conservent longtemps. Lors de notre traversée du Pacifique, nous avons mangé nos derniers pamplemousses seulement 2 ou 3 jours avant d'atterrir aux Tuamotus. Soit 5 semaines et demi de conservation, un record ! Ces pamplemousses (grapefruit in english, pomelos en espagnol), sont donc à emporter en quantité.

 

Ensuite penser aux fruits secs plus ou moins confis comme les pruneaux, dates, figues et bananes sèches. Enfin les noix en tout genre… Noix, noisettes, pécan, cajou, cacahouètes, amendes, ou même pipas (graines de tournesol, grillées - salées) etc…/… 

 

 

Concernant la viande...


     Je place cette denrée vraiment en tout dernier car pour notre part, nous étions loin d'être de grands carnivores. Cependant il existe un peu partout dans le monde de bonnes conserves de viandes ou bien des pâtés en conserve de très bonne qualité. Cela changeait du poisson, omniprésent dans nos assiettes... C'est ainsi que nous avions fait une bonne réserve de boîte de pâté de porc (au Chili) et de viande de zébu (carrés préparés en sauce) en Indonésie, Malaysie ou Singapore. Dans toute l'Asie d'ailleurs, on trouve de très bonnes conserves de zébu, épicées, valant largement notre bœuf Miroton bien de chez nous ! On trouve aussi de l'épaule en conserve ou du jambonneau, très bonnes conserves provenant d'Australie/ Nouvelle Zélande. On peut aussi emmener des jambons secs ou du pemmican (viande boucanée séchée).

 

 

Le côté « boissons »…

 

      Bien sûr il faut avoir une bonne réserve d'eau potable à bord et faire en sorte que les réservoirs soient isolés les uns des autres. Cette précaution est une sage mesure servant à limiter une éventuelle contamination possible de l'eau. De même pour une possible fuite par raggage sur un tuyau de liaison inter-réservoirs. Les frottements et vibrations sont mortels pour la tuyauterie souple dans nos bateaux. Le clapot ou la houle pouvant faire un travail d'usure sur un passage d'arêtes vives et ainsi crever un tuyau. Ce risque sera d'autant plus vrai et présent en longues navigations !


Ensuite on peut emporter des bouteilles plastiques (poids moindre), mais se rappeler que sur la durée, le plastique contient des biphénols (BPA) qui migrent petit à petit dans le liquide avec le temps. Bon, pour une traversée, on peut transgresser cette règle bio/ écologique…

 

Ensuite, eh bien on peut emporter du vin ou d'autres boissons en boîte, en bouteilles ou en cubitainers. C'est une histoire de place, de goût et de finances. Si vous avez des bières ou des Coca à offrir aux autochtones rencontrés, vous ferez des heureux, à coup sûr ! Ce n'était pas notre cas. Voir à ce propos, les règles de base du Troc…ici...

 

En bon gaulois, on ne peut pas ravitailler un bateau au départ d'une longue traversée sans y mettre quelques bonnes bouteilles de notre élixir favoris, du bon vin ou bien du Champagne !

Au choix, mais il est des occasions dans la vie qu'il ne faut surtout pas rater…

 

Se rappeler enfin que, à bord d'un bateau hauturier, il faut impérativement posséder une bâche plastique (ou un taud ) et des seaux permettant la récupération de l'eau de pluie durant les grains ou les orages. Ils feront forcement partie du voyage eux aussi et donc il faut avoir le nécessaire…

1) pour la récolter,

2) la filtrer,

3) enfin la transvaser vers les réservoirs du bateau.

 

 

Le côté « extra ou gâteries »…

 

     Il est de la nourriture qui n'est pas spécialement indispensable à bord, mais au cours d'une longue traversée, il se passera forcement des évènements importants, une ou des rencontres inattendues. Et là, c'est au Capitaine d'avoir fait (en grand secret) une petite réserve d'extras, de gâteries… Cela peut être des bonbons, sucettes, nougats, fruits confits, spécialités régionales, cigarettes, que sais-je, mais qui sera une réserve spéciale « surprise ». Cela sera très bien venu en plein milieu d'un océan, là où la monotonie prend le pas très vite sur les évènements du quotidien. A chacun de se creuser le cigare en fonction de l'équipage, du bateau, de ses moyens, de l'histoire de chacun et de sa place à bord. Eh puis une « rencontre extra-terrestre » (au sens propre hein, E.T. est reparti depuis longtemps sur son étoile…) est toujours possible…

 

 

Si vous prévoyez  trois fois la réserve de votre temps de traversée « normale », alors allez-y tranquillou , vous aurez forcement de quoi faire face à un imprévu conséquent...

 

Même pas peur.

 

 

Qu'on se le dise …et bon vent !

 

 

 

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